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Décrochage scolaire : 6 minutes pour comprendre

Entretien avec Antonia ROLDAN, Directrice du Lieu Ressource Formation de Toulouse

Antonia Roldan, Directrice du Lieu Ressource Formation (LRF)

Le Lieu Ressource Formation, est une association loi 1901. Il est l’organisme support des Ateliers de Pédagogie Personnalisée de Toulouse depuis 1986, la pédagogie développée est au centre de l’accompagnement des publics concernés par le socle commun des connaissances et notamment pour les publics décrocheurs. Antonia ROLDAN, Directrice du LRF, fait le point sur cette problématique commune à tous les systèmes éducatifs avant de détailler les différentes solutions proposées par le LRF. Forte de plus de 20 années d’expérience, elle partage également ses idées pour améliorer la prise en charge des jeunes en difficulté.

Bonjour Antonia, pour commencer, pourriez-vous nous présenter brièvement le LRF ?

Nous intervenons pour la formation des demandeurs d’emploi, des actifs et des salariés sur des formations aux savoirs de base, apprentissage de la langue française, culture numérique, Bureautique et préparation aux concours… Nous accompagnons également les jeunes dans la réalisation de leur projet professionnel.

Via ses ateliers de pédagogie personnalisée (APP), l’association propose aussi depuis plus de 30 ans, une réponse de formation adaptée aux jeunes publics. Réparties sur nos 4 sites, les sessions sont limitées à une dizaine d’élèves par session afin de garantir proximité, écoute et individualisation des parcours.

>> En savoir plus sur les ateliers de pédagogie personnalisée [1]

Venons-en au décrochage scolaire, comment définir ce phénomène ?

Le décrocheur, ou sortant sans diplôme ni qualification, est un élève âgé de 16 à 18 ans inscrit une année donnée, qui n’obtient ni diplôme ni qualification et qui n’est pas inscrit l’année suivante dans une formation générale ou professionnelle. Concrètement, l’élève décrocheur rencontre des difficultés sur les savoirs de base. Il a été peu ou mal accompagné. Les enseignants ne pouvant proposer à chacun un apprentissage individualisé, pas ou peu aidés à la maison, les élèves se retrouvent seuls face à des échecs scolaires répétés qui les conduisent peu à peu à l’isolement.

>> Approfondir le concept de décrochage scolaire [2]

Pourriez-vous nous dresser le portrait type du décrocheur ?

Deux tiers des décrocheurs sont des garçons, souvent issus de milieux socio-économiques défavorisés.  Dans la majorité des cas, on observe une estime de soi déficiente, des relations difficiles avec les adultes, une motivation insuffisante, des difficultés scolaires et une vision très négative de l’école. Je dirais qu’il y a 3 grands types de décrocheurs : les « discrets » qui aiment l’école mais qui travaillent peu. Les « inadaptés », en situation d’échec scolaire et psychosocial, qui présentent souvent des problèmes comportementaux, voire de délinquance. Les « désengagés » sont quant à eux des élèves peu motivés qui s’ennuient en classe et qui souffrent de problèmes d’apprentissage.

>> Découvrir l’engagement du gouvernement dans la lutte contre le décrochage scolaire [3]

Quelles solutions sont proposées pour lutter contre le phénomène ?

Qu’ils soient portés par l’Etat ou par les Régions, les dispositifs s’enrichissent d’année en année. Leur logique « sur-mesure » donne à chacun une nouvelle chance de se qualifier et de trouver une place au sein de la société. Le programme Déclic, destiné aux 16/18 ans sans diplôme ni qualification permet par exemple au jeune de retrouver motivation et envie d’apprendre pour ensuite accéder à une action de formation. La Garantie Jeunes accompagne les 16/25 ans en situation de grande précarité vers l’emploi ou la formation. Le Projet pro quant à lui leur permettra d’orienter et de valider un projet professionnel… Les solutions sont nombreuses.

>> Retrouvez les différentes dispositifs de formation du LRF [4]

Auriez-vous un exemple en tête pour bien comprendre votre action ?

Prenons le cas de Arno, un jeune homme qui évolue dans un environnement familial difficile. Ne supportant pas l’autorité et les cadres, il a été exclu de plusieurs collèges. Lorsqu’il nous rejoint, Arno présente des lacunes sur les savoirs de base. Grâce au dispositif Déclic, il a retrouvé un rythme de vie normal et compris l’intérêt de définir son projet professionnel. Peu à peu il a réussi à canaliser son énergie, repris confiance et s’est fixé des objectifs clairs et atteignables. Son projet professionnel a fait ressortir une palette de métiers dans l’Éducation et le Sport. Désormais, Arno bénéficie du dispositif Sésame : un parcours individualisé vers une formation d’éducateur sportif ou d’animateur !

Selon vous, qu’est–ce-qui pourrait être envisagé pour contrer plus efficacement le décrochage scolaire ?

Les moyens éducatifs sont là et ils portent leurs fruits, nous sommes passés de 140.000 décrocheurs en 2014 à 80.000 en 2019. Différents programmes, mesures politiques et initiatives peuvent permettre de favoriser encore davantage la réussite et la persévérance scolaire : dépistage des décrocheurs potentiels, amélioration du suivi et du soutien dans les études, valorisation de l’effort, encouragement à la lecture et au désir d’apprendre, recours au travail manuel, développement de l’alternance et de l’apprentissage, entretiens individuels et ateliers individualisés… Pour conclure, je dirais que les écouter et leur parler de leurs envies d’avenir est le meilleur moyen de les remobiliser !

>> Découvrir les chiffres du décrochage scolaire [5]

>> Pour aller plus loin [6]

Propos recueillis par Les Acteurs de la Compétence